ENTRETIEN AVEC OULEIMATOU BA, AUTEURE DE « L’UNION INTERDITE » : « Je crois que le changement doit commencer par les parents »

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La jeune écrivaine malienne, Ouleimatou Ba, vient de mettre sur le marché du livre son deuxième roman intitulé « Union Interdite », après « Coupe de foudre à Bamako » dans la même collection Djarabi aux éditions Les Princes du Sahel. Ce dernier ouvrage est un roman de poche de 110 pages qui aborde une thématique assez fréquente dans notre société, mais dont on parle assez peu dans la production littéraire : l’amour interdit entre deux ethnies. Une pratique ancestrale qui perdure encore dans notre société malgré la modernité. Détentrice d’un master en Gestion et un DUT en Commerce international, Ouleimatou Ba travaille actuellement en tant qu’office manager dans un cabinet d’avocats d’affaires à Bamako. Elle a bien voulu répondre à nos questions sur son livre.

Aujourd’hui-Mali : Pouvez-vous nous présenter votre ouvrage « L’Union Interdite » ?

Ouleimatou Ba : L’Union Interdite raconte l’histoire de deux jeunes amants à l’amour interdit. Un amour interdit pour cause de leur nom de famille et leur ethnie. Les deux jeunes, Ibra, un noumou (forgeron) et Nafi, issue de l’ l’ethnie peulh sont amoureux l’un de l’autre mais ils seront confrontés à des obstacles sociétaux, culturels et personnels. Le livre parle aussi du mariage arrangé et le mariage consanguin qui sont très fréquents dans notre société, malgré la mutation vers la modernité.   

 Pourquoi le choix du thème du mariage impossible ?

Le thème de ce livre est inspiré d’une réalité de la société malienne traditionnelle ou moderne. Cette thématique est presque un problème quotidien dans notre société. Je connais des histoires de mariage interdit et de mariage arrangé.

Je me suis toujours posée la question de savoir pourquoi cette pratique ancestrale perdure dans notre société ? C’est ce qui m’a motivée à écrire ce livre que je considère comme ma petite pierre à la sensibilisation contre ces pratiques séculaires qui empêchent aujourd’hui beaucoup de jeunes d’avoir une vie de couple et heureux parce que mariés à des personnes dont elles ne sont pas forcément amoureuses.    

Comment comprendre que notre société, qui se dit aujourd’hui musulmane reste toujours cramponnée à des pratiques ancestrales alors que l’islam ne fait « aucune distinction de race »  en terme de mariage ?

Je crois que nous sommes dans une société très conservatrice où les gens se réfèrent plutôt à la tradition qu’à l’islam malgré cette forte présence de la religion musulmane dans notre société. Je pense qu’avec la nouvelle génération, les choses vont changer. Nous remarquons déjà un changement même s’il est lent. Mais je crois qu’avec les générations futures, les choses vont changer. Il n’est pas rare de voir aujourd’hui des couples issus de ces ethnies dont on disait interdite leur union.   

Fathma, une cousine d’Ibra lui est proposée en mariage alors que ce dernier est amoureux de Nafi. Alors quel est votre avis sur le mariage arrangé ou le mariage consanguin ? 

Personnellement, je ne suis pas contre le mariage arrangé. Ce dont je suis contre, c’est le mariage forcé car arranger un mariage dans lequel l’homme ou la femme n’est pas d’accord, revient à un mariage forcé. Le mariage entre cousin et cousine est une pratique assez mal vue dans certains pays comme la Côte d’Ivoire. Certains considèrent cette relation comme incestueuse, mais notre société à ses traditions et je pense que certaines traditions n’ont plus leur place dans la société actuelle.   

Selon-vous, comment notre société peut-elle s’affranchir de cette pratique ancestrale, aujourd’hui source de malheur de nombreux couples ?

Je crois que le changement doit commencer par les parents et il va falloir un début car de nombreux parents sont pour le changement, mais ne veulent pas que ça commence par eux. C’est ça le grand souci. Si ça ne tient qu’aux jeunes, je crois que ces pratiques disparaitront, mais tant qu’il y a toujours des parents hésitants à commencer, je crois que ces pratiques vont encore perdurer dans notre société. Je pense qu’il faut que le changement commence par soi. C’est à ce prix que nous parviendrons à abolir ces pratiques.       

L’héroïne du livre, Nafi, la trentaine, est toujours vierge. Ce, sans aucune contrainte religieuse ou de maladie. Pensez-vous que cela soit possible de nos jours chez les jeunes filles notamment celles de la capitale ?

Je dirais plutôt contrainte culturelle et sociétale car je crois que ce sont plutôt les traditions de la société qui poussent certaines filles à rester vierges jusqu’au mariage non pas forcément la religion qui nous  demande de nous préserver. Certaines le font dans le but d’honorer leur famille. Il y a aussi des filles qui choisissent  de rester vierges par choix sans contrainte aucune. Je pense qu’il existe toujours des filles de la trentaine, même à Bamako, qui le sont. C’est un choix et il y en a qui respectent leur choix. 

Dites, comment êtes- vous devenue écrivaine ?

Je crois que je me suis intéressée à l’écriture depuis ma dizaine. A l’époque, j’aimais écrire de petits poèmes.  Aussi, je crois que c’est la lecture qui m’a donné plus de goût pour l’écriture. J’ai très vite aimé la lecture. Et pour pourvoir écrire, il faut d’abord aimer lire.

Avez-vous d’autres projets d’écriture ?

Oui j’ai d’autres projets d’écriture, d’abord dans cette même collection Djarabi. Mais ces projets avancent lentement pour cause de mon travail qui ne me donne assez de temps pour l’écriture, mais j’essaye de faire de mon mieux pour écrire.  En dehors de la collection Djarabi, je suis également sur un autre roman policier même si je ne sais pas quand je le finirais.

        Réalisée par Youssouf KONE 

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