Découverte : Ibrahim Ballo, le tisseur de lien « universel »

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Le jeune Ibrahim Ballo est un artiste plasticien malien de talent et engagé pour un monde meilleur. Avec de multiples expositions à son actif au Mali et à l’international, le jeune Ballo peut être considéré aujourd’hui comme l’un des jeunes qui font la fierté de l’art malien en Afrique et dans le monde. De la peinture, du bogolan et des fils sont à la base de ses fascisantes et magnifiques créations qui font écho hors des frontières maliennes. Nous sommes allés à sa rencontre dans un quartier populaire de la capitale malienne.

Au Mali, quand tu dis que tu es peintre, la plupart de gens pensent que tu fais de la décoration de maisons », rigole Ibrahim affichant un air amusant et un regard perdu dans ses toiles, certaines étalées sur la terrasse et d’autres, finies, adossées contre le mur.  C’est pourtant la triste réalité dans notre pays, voire en Afrique où les arts visuels restent à découvrir. Très peu de Maliens connaissent cet art dont les acteurs sont des grands ambassadeurs de notre culture sur le continent africain et dans le monde.

Passionné des arts depuis le bas âge, Ibrahim Ballo, après ses études primaires, intègre l’Institut national des Arts (INA) où il sort avec un diplôme en arts plastiques, en 2012. Ensuite, il poursuit ses études au conservatoire des arts et métiers multimédia Balla Fasséké Kouyaté où il sort avec un master en arts plastiques, en 2017. Aujourd’hui, Ballo est un artiste jouissant d’une notoriété internationale. Il expose en solo, duo et en collectif au Mali, en Afrique et dans le monde. Il est également membre des collectifs de jeunes artistes réunis au sein de Sanou’Art et Tim’arts, tous deux basés à Bamako au Mali.

Issu d’une famille d’artistes, Ibrahim n’a fait que suivre son destin qui l’avait naturellement guidé dans le métier des arts. Un papa musicien-instrumentaliste et une grand-mère chanteuse ont suffi à donner l’amour des arts au jeune Ibrahim qui depuis à l’école primaire dessinait pour ses amis contre quelques pièces d’argent. D’ailleurs, la technique de tissage sur les toiles d’Ibrahim s’inspire du filage de coton de sa grande mère : « Je l’ai juste développé et personnalisé au fil de mes formations dans les écoles d’arts », nous raconte-il.

Un artiste idéaliste

Ses matériaux ? Simples ! Du bogolan (tissu traditionnel malien), de la peinture et des fils. Mais le résultat est tout simplement époustouflant tant l’harmonie est éblouissante dans ses créations. Cependant, le plus important pour un artiste, de surcroît un plasticien, ce n’est pas seulement la beauté de ses créations. Mais plutôt le message que celles-ci véhiculent.  C’est pourquoi, sur les toiles d’Ibrahim Ballo vous verrez généralement des personnages en état d’émotion avec des taches rouges sur le visage pour dire que « chaque être humain, qui qu’il soit, camoufle un fragment de souffrance en lui ».  Les toiles d’Ibrahim évoquent en général des thèmes comme l’oppression, la trahison, la guerre, les violences.

La toile  »L’homme tissé » à Ségou’Art en 2020

La démarche artistique de l’artiste inspirée des techniques du tissage traditionnel malien représente les liens unissant les hommes. C’est reflet d’un tissu social essentiel à la cohabitation positive. Si le fil utilisé dans le tissage rompt, il met l’homme à nu, le fragilise et défait le lien social. « Face aux difficultés de la vie, j’appelle, dans mes œuvres, à l’union et au vivre ensemble. Le tissage dans mes œuvres symbolise les liens que nous dévons tisser entre nous afin de rester soudés, même dans les difficultés », nous confie l’artiste qui accorde beaucoup de valeur aux couleurs des fils utilisés dans ses créations : « les couleurs symbolisent l’harmonie. Pas seulement entre Maliens ou Africains, mais entre tous les hommes de l’univers, toutes les couleurs de race qui existent dans le monde. Voyez comment les couleurs tissées sur les habits les rendent beaux. Je rêve d’un monde pareil où nous sommes tous des sœurs et frères vivant dans la paix et l’harmonie », ajoute l’artiste.

Aujourd’hui, Ibrahim Ballo n’est plus à présenter au Mali, voire en Afrique pour avoir participé à de nombreuses expositions sur le continent et au-delà de la Méditerranée. D’abord, sur le plan national, Ibrahim a participé à l’exposition collective de peinture à la galerie Medina Bamako organisée par le collectif Tim’arts en 2015, sans oublier ses 4 participations successives (de 2014 à 2017) au Festival international des arts visuels (Faiva) organisé par le Centre Soleil du Mali. Un centre culturel qui contribue énormément à la promotion des jeunes artistes.

En 2015, Ballo prend part à l’exposition collective d’Angers Jumelage (AAJ) et Amnesty international au 31ème Salon des artistes pour la liberté en France (Angers). En 2016, il participe à une exposition duo à la galerie Tim’arts au Musée du district de Bamako. Fort de ces expositions, Ballo est invité à participer au Festival Murmures au Burkina Faso en 2016, avant de remporter en 2017 le prix des ateliers Sahm en Arts Visuels lors de 6e édition du Festival international des arts visuels au Congo Brazzaville, en 2017. Ballo était également à la biennale de Dakar, en 2018. Il expose en 2019 à la Villa Soudan de Bamako et à la Villa Yirisuma du Burkina Faso. A noter que ses œuvres ont été exposées à Akka à Paris (France) grâce à Galerie Chauvy. Il était également dans la sélection officielle de Ségou’Art cette année (2020). C’est dire combien Ibrahim est sollicité aujourd’hui.  

Rêve en Féminin

Mieux, l’avenir reste promoteur pour cet artiste talentueux, humble et affable, puisque des grands projets sont à son programme. Pour preuve, Ibrahim prépare plusieurs expositions, notamment à Paris (France) en novembre 2020 et une autre à Bruxelles en Belgique, fin 2020. Aujourd’hui, Ballo a décidé de transmettre son savoir à des jeunes qui travaillent dans un atelier dénommé « Le Pinceau » et ouvert chez lui. Ils sont 6 jeunes à y travailler. Ils travaillent plus dans la communication visuelle, c’est pourquoi Ballo ambitionne d’en faire, à l’avenir, une agence de communication digne de ce nom.

Ce que l’artiste regrette, c’est la méconnaissance, sinon le peu d’intérêt des Maliens, voire des Africains, pour les arts visuels du continent qui sont appréciés et achetés en Occident ou ailleurs.  Toutefois, le jeune artiste souhaite former plus de jeunes artistes maliens à porter haut les couleurs du Mali, à travers le monde avec ses pinceaux et son aiguille.

         Youssouf KONE

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