4 juin 1989 : Les Aigles du Mali créent la sensation en Coupe Cabral à Bamako

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Le dimanche prochain c’est le 4 juin. Pour l’une des rares fois le 4 juin tombe sur un dimanche. D’aucuns diront, comment cette remarque peut-être un événement, au point que l’on s’y intéresse. Et cela à juste titre, cette date du 4 juin 1989, le peuple malien était perdu dans une liesse populaire parce que les Aigles ont remporté pour la première fois une coupe, fût-elle sous-régionale. C’était contre le Sily National de Guinée-Conakry. Dans quelle ambiance ce tournoi Amilcar Cabral a été organisé par notre pays ? Quel était l’enjeu principal ? Les suspenses ? La finale ? Les récompenses ? La chronique « Regard sur le passé » revient sur cette victoire historique. Tout petit, nous n’avons pas vécu la Can de Yaoundé-72. Par la sui[1]te, l’histoire et le temps nous ont permis de comprendre que le Mali avait une équipe homogène avec de grands joueurs. Jusqu’à preuve du contraire, elle demeure la meilleure formation des Aigles. Depuis 1972 le Mali n’a pas joué une finale de Can. Nous remémorons cette belle page du football pour exploiter la brèche ouverte qui conduit aux Aigles, version 1989. Cette cuvée aussi était à la hauteur avec seulement trois professionnels : Gaoussou Samaké, Abdoulaye Kaloga et Amadou Pathé Vieux Diallo. Les joueurs locaux composés de Boubacar Sanogo, Mohamed Djilla, Seydou Diarra dit Platini, Mahamadou Cissé dit Tostao, Yacouba Traoré dit Yaba, Oumar Guindo, Ousmane Farota, Aly Diarra, Abdoulaye Traoré dit Abloni, Yacouba Diarra, Aboubacar Vieux Djan Traoré, Bakary Diakité dit Bakariny, Alassane Coulibaly étaient tous valeureux. Après un nul vierge à Bamako, ces Aigles ont éliminé le Maroc, le 23 avril 1989 à Casablanca, et attendaient les Eléphants de Côte d’Ivoire pour le dernier tour. C’est dans cet intervalle que le tournoi Cabral fut organisé à Bamako, avec comme ministre des Sports feu Bakary Traoré, un pieux. Le Mali évoluait dans le groupe A en compagnie du Sénégal, de la Guinée Bissau et du Cap Vert. Pour ses deux premières sorties, il a enregistré deux matches nuls, pendant que les Bissau-Guinéens et les Sénégalais ont respectivement empoché trois points. Ce qui plaça les nôtres dans une zone de turbulences pour leur troisième sortie contre la Guinée-Bissau dont l’arme fatale était Armando. A défaut d’une victoire les Aigles seraient éliminés et notre fête aurait perdu son goût, son cachet solennel. Jusqu’à l’ultime minute les 20 000 spectateurs ont poussé les Aigles. Puis survint ce coup franc en faveur des Aigles pendant que le score était d’un but partout. La délivrance Bakary Diakité dit Bakariny, spécialiste des balles arrêtées s’empare du ballon, pour percer le mur bissau-guinéen qui s’est entre-temps barricadé. Le latéral droit malien s’apprête à tirer, quand Yacouba Traoré dit Yaba le bouscule et tire le coup franc. La balle dans sa trajectoire frôle le pied d’un joueur sur le mur et trompe le gardien : deuxième but malien. Ce fut l’ex[1]plosion de joie dans les gradins, avec des supporters tombés en syncope. Les Bissau-Guinéens déboussolés par ce coup de grâce se débattent pour égaliser. Mais en vain ! Les Aigles sont en 1/2 finale et affrontent la Sierra Leone. L’immense stoppeur du Stade malien de Bamako Aboubacar Vieux Djan Traoré profite d’un corner et dévie le ballon de la tête pour marquer l’unique but du match. Le Mali est en finale. Jusque-là, le pari est gagné, l’enjeu demeure le trophée. En son temps, les primes étaient dérisoires, et pour cette finale les autorités du pays n’ont pas fait de promesses. Mais l’engagement était patent et traduisait la motivation des joueurs. La présence et l’assistance du ministre des Sports dopaient le cœur des jeunes !!! La finale se joue le 4 juin 1989. Les Aigles s’imposent par 3 buts à 0. Dès le coup d’envoi ils ne donnent pas le temps aux Guinéens de développer leur jeu, ou même tenter d’imposer leur rythme. A la 6e, Gaoussou Samaké marque un but d’anthologie. Ce fut tellement beau qu’il faut rappeler l’action. Il hérite d’une balle renvoyée par la défense guinéenne, l’amortit de la poitrine et déclenche un tir à écorner un bœuf. La balle bondit sous la barre du portier Fodé Laye Camara, pour se loger dans les filets. Ce but matinal ne peut que susciter une réaction vive de l’adversaire. Les Maliens sont requinqués par leur audace à assommer une formation guinéenne déterminée à confirmer son parcours sans faute. L’égalisation intervient à la 23e sur une position hors-jeu signalée par l’arbitre assistant sénégalais. Les Guinéens se lancent dans la contestation, oubliant que la partie continue. Les nôtres en profitent pour inscrire le 2e but par Amadou Pathé Vieux Diallo, sur un centre de Boubacar Sanogo. Les deux équipes regagnent les vestiaires sur ce score. L’apothéose A la reprise les Guinéens pris à dépourvu, et trempés dans l’eau ne peuvent se remettre de leur cauchemar. Les Aigles du Mali soutenus et par plus de 25 000 spectateurs brisent les espoirs de l’adversaire avec un 3e but à la 71e sur une œuvre de Boubacar Sanogo. L’attaquant stadiste le plus en vue à l’époque est mis sur orbite par Amadou Pathé Vieux Diallo. Et il n’a aucune peine pour tromper le portier Fodé Laye Camara. C’est la fin du mythe sous la forme de rumeurs, selon lesquelles le père Bouvier aurait maudit le football malien. Et ce qui est évident, le Mali ne remportera jamais un trophée parce que le père Blanc aurait été dépossédé de son terrain par l’Etat malien. Que de fadaises !!! Les autorités politiques offrent un terrain à usage d’habitation à chaque joueur et une modeste somme (selon le président Moussa Traoré) de 10 000 000 F CFA à l’équipe. C’est pratiquement la plus grosse récompense depuis les Jeux africains de Brazza (1965), en passant par la Can de Yaoundé (1972). Hélas ! Autre temps ! Autres réalités ! Aujourd’hui, les conditions de vie et de traitement des différentes équipes nationales ont évolué au maximum. Cette vaillante formation des Aigles n’aura pas la chance de se qualifier pour la Can d’Alger (1990). Elle est éliminée par les Eléphants de Côte d’Ivoire. C’est encore le Cameroun qui lui barre la route un 28 avril 1991, pour la Can de Sénégal (1992). L’histoire retiendra pour toujours que cette équipe était bien soudée et managée par un encadrement technique modeste et compétent. Après les événements de 1991, l’entraîneur national Kidian Diallo et son staff démissionnent. Les Maliens aspiraient alors au changement à tous les niveaux, suite logique des événements du 26 mars 1991. O. Roger Tél (00223) 63 88 24 23

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