Que sont-ils devenus ? Moussa Diouf : L’âme de l’équipe de basket du COB (1980-1989)

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Moussa Diouf fait partie de l’équipe de basket-ball de l’AS Somiex victime de la réforme sportive, initiée en 1979 par le ministre de la Jeunesse et des Sports d’alors, Alpha Oumar Konaré. Cette mesure visait à créer des clubs omnisports, ce qui conduisait automatiquement à la disparition des équipes d’entreprise comme l’AS Somiex. Au-delà de ce coup de frein aux ambitions des sociétés et entreprises d’Etat, beaucoup de jeunes aussi ont été déboussolés parce que du coup l’opportunité de les recruter dans les sociétés volait en éclats. Pour le cas spécifique de l’équipe masculine de l’AS Somiex, dont l’un des meilleurs joueurs est notre héros de la semaine, le président du club, Hamadoun Amion Guindo, fit une proposition concrète. Tout en insistant sur l’esprit du groupe, il a conseillé que toute l’équipe intègre le Club olympique de Bamako (COB). Il concluait qu’au Djoliba ou au Stade malien de Bamako, il n’était pas évident que tous les joueurs se fassent immédiatement un nom. Mais, leur venue au COB serait une occasion pour défier les grands clubs et créer un équilibre sur l’échiquier national. D’après Moussa Diouf, c’était la fête au village au COB, tant les dirigeants olympiens étaient contents. Effectivement ; le temps a donné raison à Guindo, parce qu’avec la nouvelle génération, conduite par Moussa Diouf, le COB a joué quatre finales de Coupe du Mali (1986, 1987, 1988, 1989).

Aujourd’hui, il salue l’esprit de bon père d’Hamadoun Amion Guindo qui, malgré ses pouvoirs de licenciement, a décidé de garder certains joueurs dans l’entreprise. Bref, pour en savoir davantage, Moussa Diouf, ancien international du COB et de l’AS BIAO nous a reçus à son domicile, à Yirimadio, dans le cadre de la rubrique « Que sont-ils devenus ? »  Pour introduire l’entretien, il ne donne pas l’occasion de savoir comment il est devenu ce grand joueur de basket-ball. Seulement, il soutient qu’il est difficile qu’un enfant du quartier populaire de Medina Coura soit indifférent au sport. Au pire des cas, il devient un fervent supporter d’un grand club. Autrement dit que sa décision d’intégrer le centre de formation du Stade malien de Bamako n’était que la suite logique de cette assertion. Son admission au CEP, la distance entre son quartier et le terrain d’entraînement du club à Hamdallaye, finirent par le décourager. Avec cette nouvelle donne comment et pourquoi il a choisi la balle au panier ? La réponse et d’autres détails sur sa longue et riche carrière dans les lignes qui suivent.

Ayant abandonné les terrains de football pour des contraintes insupportables pour lui, Moussa Diouf avait un autre obstacle à franchir : convaincre son frère Samba Diouf que le basket-ball est loin d’être une discipline féminine.

Pour étayer ses propos, il se référa aux aînés du quartier qui évoluaient déjà dans les grands clubs : Alassane Kanouté, Dramane Coulibaly dit Draba, Mamadou Touré dit Vo, Moussa Sissoko dit Bambo, Abdoulaye Touré dit Ablo et autres. Parvenu à convaincre son frère, il lui conseilla le basket-ball comme emploi du temps après les cours en classe. Bien qu’ils aient le Stade dans l’ADN, par le canal de leur oncle Moussa Traoré dit Gigla, et leur carré de naissance « Stade-Carré », Moussa et Samba Diouf ne pouvaient malheureusement pas jouer au Stade malien de Bamako parce que leur génération qui y évoluait était déjà en avance sur eux. La seule option pour les frères Diouf était le terrain d’entraînement de l’Ecole nationale d’ingénieurs (ENI), où Moriké Kanté s’occupait des jeunes. Au technicien, ils firent part de leur désir, leurs objectifs et ambitions. C’est ainsi qu’ils commencèrent pieds nus l’initiation au basket-ball en 1978. Au bout d’un an, Moussa Diouf a mûri pour être ce basketteur prodigieux. Il est affecté à l’équipe B de l’AS Somiex pour se forger un destin et intégrer le haut sommet.

 Il réussira ce pari à l’issue d’un match d’ouverture de saison contre le Djoliba. Comme annoncé plus haut l’élan de bon nombre de clubs d’entreprise est brisé par la réforme sportive. Moussa Diouf, par ses qualités avérées, devint au COB en 1980 l’enfant chouchou de l’entraîneur Soumeylou Boubèye Maïga (ex-Premier ministre). Quelques années plus tard, celui-ci l’a inscrit au Dojo du Camp-Para de Djicoroni pour qu’il améliore sa musculature. En 1981, il s’enflammera à tous les coups. Ce qui lui vaudra sa sélection dans l’équipe du district de Bamako, pour la Biennale à Mopti. L’équipe de la capitale a naturellement impressionné et remporté le trophée. Cet exploit justifie la décision de la Fédération malienne de basket-ball d’envoyer la même équipe pour représenter le Mali au Championnat d’Afrique junior en Mauritanie. Compétition qu’elle remportera. Quelques mois après ce sacre, Moussa Diouf jouera à Bamako le championnat d’Afrique Zone II, que les Aigles perdront face au Sénégal. Ainsi de 1980 à 1989, il tint le COB à bout de bras. Entre-temps, il jouera les éliminatoires des Jeux africains à Dakar en 1984, remportera avec l’équipe nationale le tournoi junior de la Zone II, décrochera avec l’USFAS la 1re édition du Conseil international de sport militaire en Afrique, participera au tournoi de la Cédéao en 1986 à Dakar, et au Championnat d’Afrique masculin en Tunisie, avec un stage bloqué d’un mois en France, sanctionné par la troisième place

des Aigles, le championnat d’Afrique masculin en Angola en 1989. Pour des raisons personnelles, il a décliné l’offre des dirigeants de l’Usfas. Pourquoi ? « Après le tournoi militaire que l’Usfas a remporté, j’ai été encore sélectionné pour jouer la phase mondiale à Dakar. Je devais préparer mon examen de sortie, donc je ne suis pas parti au Sénégal après la qualification. Mais avant la compétition, les dirigeants de l’Usfas m’ont proposé la gendarmerie avec le grade de MDL-chef. Certes, c’était une offre alléchante. J’ai exigé qu’on en parle aux dirigeants du COB. Ils ne l’ont pas fait, et j’ai vu en cela l’alibi tout trouvé pour décliner l’offre. Parce qu’en réalité ma mentalité au moment des faits était contraire aux contraintes de l’armée ». Des parquets aux affaires Des parquets aux affaires Des parquets aux affaires Des parquets aux affaires Des parquets aux affaires En 1989, comme tout jeune diplômé sans emploi, Moussa Diouf construisait virtuellement son avenir chaque soir à l’heure du coucher parce que l’heure pour lui de prendre la charge de la famille a sonné. Comment y faire face dans une atmosphère de chômage ? Cette problématique s’est fondue quand la proposition de l’AS BIAO est tombée : un emploi + 500 000 F CFA.

Moussa soutient n’avoir pas réfléchi deux fois pour signer séance tenante la lettre de démission du COB. Mais il y a problème ! Son entraîneur et mentor, Soumeylou Boubèye Maïga, apprend l’information quelques minutes après son audience avec le directeur de la banque. Il convoque Moussa Diouf et lui demande de renoncer à son transfert à l’AS BIAO. Une décision difficile pour le joueur qui, pour tempérer les ardeurs du journaliste-entraîneur, lui demande un temps de réflexion d’au moins vingt-quatre heures. Mieux, Boubèye demande l’intervention du vieux Diouf pour contraindre le jeunot à abandonner son projet. L’ancien Premier Ministre se résigne quand il n’a pas eu de « retour » favorable du vieux. Cela a presque sonné la rupture entre Moussa Diouf et son protecteur. Pour preuve, en février 2019, quand il a assisté au mariage de la fille de Boubèye, celui-ci a dit ne pas se rappeler de lui. A l’AS BIAO, il aura passé quatre saisons sanctionnées par deux titres de champion (1990, 1992) et une Coupe du Mali (1992), une phase finale de Coupe d’Afrique des clubs en Egypte en 1993. La même année, la nouvelle équipe dirigeante de la BIAO a pris des mesures draconiennes pour annoncer son arrivée aux affaires. Conséquence immédiate : les équipes féminine et masculine de basket-ball sont dissoutes, tous les joueurs qui n’avaient pas un contrat écrit sont remerciés. Malheureusement, Moussa Diouf s’est retrouvé dans ce dernier lot.

L’INPS, selon notre héros du jour, a saisi la balle au rebond pour demander à la banque les reversements des travailleurs licenciés. Il a gagné son procès, mais les joueurs dans l’euphorie d’embauche n’avaient pas eu le réflexe d’exiger un contrat en bonne et due forme à l’employeur. Ce qui a fait qu’ils n’ont pas pu bénéficier d’indemnités de licenciement, au moment où ils ont traduit la banque devant l’inspection du travail et les tribunaux. Après cet épisode, les dirigeants du COB sont revenus à la charge afin que Moussa Diouf réintègre son ancien club. Il dit n’avoir pas eu à l’époque de répondant moral pour pratiquer le basket-ball. En un mot la fin de l’aventure de l’AS BIAO sonna également sa retraite sportive. Il créera son entreprise de BTP et de commerce général pour mener des affaires. Moussa Diouf  est marié et père de quatre enfants.                        

O. Roger                                                                      

Tél (00223) 63 88 24 23

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