AÏCHA DEMBELE, CO-FONDATRICE DE LA START-UP « SO-DÔKÔTÔRÔ »: « Notre plateforme offre la possibilité de consultation et de soins à domicile à la demande du patient en ligne »

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Ingénieure de systèmes d’information de formation, Aïcha Dembélé est la co-fondatrice de la start-up « So-Dokotoro », première start-up malienne qui offre des services de santé de référence. Elle nous a accordé une interview, dans laquelle elle nous parle de sa start-up, tout en précisant sa particularité, les difficultés rencontrées lors de sa création, avant d’appeler les jeunes entrepreneurs à persévérer avec passion dans leurs projets.   

Aujourd’hui-Mali : Parlez-nous de la start-up « So-Dokotoro » ?

Aïcha Dembélé : « So-Dokotoro » est la première start-up malienne d’offre de service de santé de référence à base communautaire par la mise en relation des patients et des médecins, à travers une plateforme web et mobile. Elle offre la possibilité de consultation et de soins à domicile à la demande du patient en ligne.

Nos services rendus à domicile portent sur les premiers soins. En fonction de la complexité et de l’urgence des cas, So-Dokotoro procède à un référencement vers des structures de santé spécialisées partenaires. Notre plateforme 100% digitalisée permet également la mise en relation patient-médecin à l’aide de la géolocalisation, la prise de rendez-vous, la dématérialisation du dossier-patient pour son suivi, la consultation en ligne, la délivrance d’ordonnance en ligne, le paiement en ligne, l’affiliation via la plateforme des médecins et le référencement de l’ensemble des structures de santé. SO-DÔKÔTÔRÔ est le fruit du partenariat qui lie l’Université du Mali et Bamako Incubateur dans le cadre de la mise en œuvre du programme « GENESIS Startp Mali » financé par le PROCEJ et le PADES.

Qu’est-ce qui vous à motivé à lancer cette start-up ?

Nous sommes dans un pays où la dépense moyenne dans la santé par ménage s’élève à 43 154 Fcfa, or le salaire minimum ici au Mali est estimé à 62 000 Fcfa. En dépit de cela, nous constatons une inégalité d’accès aux soins entre les ruraux et les citadins, due au reculement des zones rurales à des structures de santé.

Chose qui entraîne l’un des plus faibles ratios de fréquentation des structures de santé avec 0,33 nouveau contact par habitant par an, selon l’annuaire du système d’information sanitaire du Mali 2010. A contrario, de l’autre côté, seulement 60 médecins sur 2000 ont été recrutés lors du dernier concours d’entrée à la Fonction publique. Les 1940 restants sont au chômage.

Nous n’avons pas assez de médecins et nous en avons tant qui sont toujours au chômage. C’est pour résoudre ces difficultés que nous avons décidé de mettre en place cette start-up. Tous ces constats se traduisent par des décès qui surviennent à cause d’un recours tardif aux services de santé lié à la distance, au manque de personnel de santé qualifié, au chômage des jeunes médecins et à la pauvreté.

Quelle est la particularité de « So-Dokotoro » ?

Pourquoi choisir So-Dokotoro ? La vraie valeur ajoutée de notre start-up est que nous offrons un package de services spécialement rendu à domicile. Nous faisons le référencement des médecins. Mieux, nous rajouterons la biométrie.

Nous faisons également la prise de rendez-vous pour les patients, nous allons plus loin car nous proposons d’archiver le dossier médical du patient. Nous sensibilisons aussi la population sur les maladies les plus courantes, telles que la pandémie de la Covid-19, dans les langues locales et c’est cela qui rend notre solution absolument unique.

De son lancement à nos jours, votre start-up a-t-elle rencontré du succès ?

De son lancement à nos jours, la start-up So-Dokotoro a honoré le Mali en remportant plusieurs prix à plusieurs niveaux, notamment national, sous régional et international. En février 2020, So-Dokotoro a remporté le premier prix Start-up Challenge de la première édition de Bamako Digital Days. Nous avons également remporté le prix de la meilleure Start-up digitale féminine, prix dédié aux femmes entrepreneures décerné par Onu-Femmes en février 2020.

Sur le plan sous-régional, So-Dokotoro a reçu le prix d’accompagnement GreenTech Capital Parteners et celui de la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Côte d’Ivoire, lors du African Rethink Award (ARA) organisé par le Land Of African Business (LAB) en Côte d’Ivoire en 2018.

En 2019, nous avons également remporté le prix « Coup de cœur du jury » étant à la 3e position sur 100 start-ups africaines sélectionnées lors du Global Social Venture Competition (Gsvc) organisé par l’Essec France à Rabaten.

En plus de cela, nous avons participé à plusieurs événements internationaux tels que Youth Connect organisé en 2018 à Kigali au Rwanda, la conférence économique sur le digital en Afrique à Lyon en Novembre 2018, le programme de résidence jeunes entrepreneurs Afrique-Bordeaux à Paris et à Bordeaux en Juin 2019.

Avez-vous rencontré des difficultés dans la mise en œuvre de « So-Dokotoro » ? Si oui lesquelles ?

De sa création à nos jours, nous avons pu faire face à de multiples défis. Nous avons rencontré de nombreuses barrières à l’entrée telle que la réglementation qui exige d’être médecin pour lancer un projet dans ce domaine, la maitrise des Tics, le mix de compétences d’ingénierie financière, la technique commerciale que requiert le projet et le besoin en fonds de roulement relativement élevé. Lors des deux premières années d’idéation de la start-up, l’équipe s’est battue sur fonds propres pour la réalisation du projet avec l’aide et l’assistance de Bamako Incubateur.

Comment envisagez-vous le développement de l’économie numérique au Mali dans les prochaines années ?

À mon avis, l’avenir d’un pays en voie de développement dans le domaine de l’économie numérique ne peut être que brillant et espérant. De nombreuses activités innovantes et numérisées ne font que pétiller ces dernières années au Mali. Avec cette évolution, je crois fort que l’économie numérique puisse connaître de beaux jours dans les prochaines années, comme en Corée du Sud, etc.

Avez-vous un message à transmettre aux jeunes entrepreneurs qui veulent lancer leur propre start-up ?

J’encourage vraiment mes jeunes frères et sœurs qui veulent lancer leur projet à entreprendre avec vision, passion et générosité. Je dirai que, sans cela, nous ne pourrons point surmonter avec dévouement les obstacles qui nous embarrassent pendant la réalisation de nos projets. À chaque niveau son challenge, mais pour mieux s’en sortir, nous devons d’abord accepter mentalement que ce n’est pas facile. Ça n’a pas été facile donc ça ne le sera jamais.

Votre mot de la fin ?

Au nom de l’ensemble de l’équipe So-Dokotoro, je remercie toute l’équipe de Bamako Incubateur qui a tout mis en œuvre pour la mise en place de notre start-up, tout en nous cherchant des fonds de démarrage. Elle continue à nous accompagner dans la formation, la formalisation et la structuration de notre startup.

Nous tenons également à remercier nos partenaires ainsi que nos familles qui nous soutiennent moralement et financièrement pour la réussite de notre start-up. Je prie que le tout puissant nous protège tous contre la Covid-19. Restons vigilants, cette pandémie est toujours là.

Réalisé par Mahamadou TRAORE

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