Tes mots
Tes mots me rappellent le
bon vieux temps
Ce bon temps où l’on se contentait de peu !
Où l’on ne posait pas de questions
Où l’on obéissait aux parents
À leurs mots et à leurs regards
À leur clin d’œil et à leur tapotement
De façon limpide comme l’eau de roche,
Des fois avec la bouche
dans un masque
On pouvait en prendre une baffe
comme une vilaine bourrasque,
Sans s’en plaindre ni même se rebeller
Il fallait écouter les aînésBon gré mal gré
Ceux et celles qui ont une longueur d’onde
Qui connaissent vraiment le monde
Ses coins et ses recoins
Qui ont marché de longs chemins
Et qui peuvent montrer celui qui est droit
Il fallait les écouter
Les écouter sans broncher
Voilà pourquoi,
je reste coi
Pour vous écouter et vous entendre
Pour comprendre sans me méprendre
C’est pour aller à votre école
Et apprendre des cendres laissées par le feu
Les signes de la vie et ceux de la mort
On peut apprendre dans la douleur
Même s’il est mieux d’apprendre sans avoir peur
Du fouet du maitre, de sa
claque en plein visage
Mais on n’apprend pas sans écouter
On n’apprend pas sans se concentrer
On n’apprend pas sans
chercher
On n’apprend pas sans méditer
On n’apprend pas sans s’éveiller
Aux battements de cœur de
l’univers
Au flux du monde et à la voix des aînés
On apprend sous l’effet du feu
Mieux sous la douceur de l’eau
C’est pourquoi j’écoute et j’attends
J’entends et j’apprends
J’apprends et j’essaie de comprendre
Sans jamais me méprendre
J’essaie de comprendre comment on se construit
De comprendre la source de
nos conflits
C’est pourquoi j’écoute, me centre et me concentre
Sur vos mots et sur vos
silences
Je m’éveille ainsi au monde
Et médite sur vos songes
Je hoche la tête et je réfléchis
Je médite quand j’entends que les temps ont changé
…
Pourtant le soleil se lève toujours à l’Est
Je médite quand j’entends que les fondations s’affaiblissent
Pourtant, le gardien du temple dort sur ses
lauriers
Je médite quand j’entends que les femmes sont
des piliers
Pourtant tout pouvoir s’affaiblit sans éducation
Alors, je me dis: « combien de temps
déjà ?
Combien de temps de silence?
D’indifférence,
de négligence ?
Combien de temps d’abandon de l’éducation ?
Depuis quand le temple du savoir est-il fermé
déjà ?
Depuis quand les grèves et les trêves et les
tralalas ?
Depuis quand déjà l’on piétine le savoir et le
devoir
Hissant très haut le drapeau de la médiocrité ?
Depuis quand ceux qui doivent bâtir l’école du
savoir
Envoient-ils leurs enfants chez Franc et les
francs-maçons,
Apprendre chez eux les choses de blanc au prix de notre sang ?
Et on s’étonne que les fondations noires s’amollissent
Qu’a-t-on fait pour qu’il se raffermissent ?
Et Depuis combien de temps déjà l’école est- elle fermée
Boycottée, sabotée,
fatiguée et mal dotée ?
Les plus grands démons se cachent derrière des
visages d’anges
Depuis combien de temps nous manque-t-on du
respect ?
Et nous nous taisons et nous fermons les yeux
Pour ne pas voir notre
honte, notre veulerie dans le miroir ?
Pour ne pas voir les élites fuir leurs
responsabilités
Et les pères s’échapper du trône de leur autorité
Pour ne pas voir les mères s’empêtrer dans la
marre
De leurs contradictions
multiples
Et aujourd’hui on se la joue proprement
Et aujourd’hui on joue à l’étonnement
De voir le Mali aller à vau-l’eau
Sous l’égide des anciens pagailleurs de l’AEEM
Foutaise ! Mon œil quelle foutaise !
Et nous la paierons cash
Nous paierons le prix de notre silence
Le prix du flot d’indifférence
Nous le paierons en espèceLe prix de notre lâcheté
Je médite quand j’entends vos mots
Vos mots qui me rappellent nos maux
Je médite et je me dis
Qu’il faudra commencer par le commencement
Pour redresser le Mali et ses fondements
Pour faire le plein d’essence
L’essence de la vie elle-même
Qui donne vie à l’esprit
Et fait place à
l’intelligence
Avoir enfin une place
Sur les places publiques
Pour enseigner à nos filles et à nos garçons
Ce que l’école n’a pas su leur donner
Enseigner
Ce que c’est que c’est qu’être femme
Ce que c’est qu’être homme
Enseigner
Ce que c’est que la dignité
L’honneur et l’Amour de la patrie
Ce que c’est que la noblesse
Le respect et le don de soi
Enseigner
Le sens de l’effort, la valeur du travail,
l’esprit de sacrifice.
Comment voulons- nous qu’ils le sachent
Sans avoir à leur parler ?
Comment voulons-nous qu’ils le sachent
Si les médiocres sont au sommet, en train de briller
En bafouant et en bégayant ?
Le savoir se cherche
Et le savoir se donne
Et on ne peut rien donner si l’on manque de temps
et de volonté
On ne peut rien donner dans le désordre ni dans
l’indiscipline
Comment avoir le savoir si ton maître est en boule ?
Est-ce inutile de le supplier IBK ?
De le motiver et d’avoir
son humeur ?
Pour nos enfants laissés à eux-mêmes
Alors, il faudra pouvoir tenir tête
À toutes ces femmes qui ont abusé
À tous ces hommes qui ont démissionné
À ce pouvoir arrogant et écervelé
Et dire qu’ils ont merdé
Et qu’il faudra donner à l’humain
Son essence première
Qui fait de lui un humain
Et qui remplit le cœur de son humanité :
Une éducation et des valeurs
Une école où apprendre
C’est là le départ
C’est là la finalité
Amazones du jour et de la nuit
Des temps de lumière et de ténèbres
Combattantes et combattants
Levons-nous pour nos enfants
Levons-nous pour ceindre les reins
Avec mille attaches en argent
Et dire à ce Pouvoir foutoir
Qu’il n’y a pas de pouvoir sans savoir
Et que le droit au savoir est à prévaloir
Levons-nous face à Boubou Cissé
Et face au Bourgeois somnolant
Levons-nous et imposons
Qu’on donne la torche du savoir à nos enfants
Afin qu’ils ne se noient
pas un jour dans les ténèbres
Sur les chemins sombres de la vie.
Comment accuser les jeunes
Avant de les avoir éduqués ?
On éduque dans le temps et dans la patience
Dans l’amour et dans la constance
Avec les sens et avec le cœur
Or les cœurs depuis longtemps sont fermés à
double tour
Et leurs clés jetées sous les eaux du Djoliba
Comme les écoles depuis
bien longtemps déjà
Pourtant tout le monde est là, et bien assis
Assis dans son nid, et bien silencieux
Comme une carpe, et fort dédaigneux
Assistant à ce silence de mort
Qui scie les vies des enfants
Et tue l’ingéniosité de leur talent
Chacun sait là où tout a foiré
Chacun sait que c’est par-là que tout doit recommencer
Si on a un peu de volonté pour changer
Il faut trouver les moyens d’éduquer nos enfants
Et que la femme
L’homme
Le citoyen
La citoyenne
Pousse ces dirigeants
Ces vieilles charrettes qu‘il faudra pousser
Pour qu’ils bougent pour qu’ils se hâtent
Et que soit enfin effective notre volonté
De faire le Mali de nos
rêves
Où le savant sera Roi
(Dédié à KEITA Fatoumata KEITA, précédemment
directrice au ministère de la promotion de la femme, de la famille et de
l’enfant)
Fatoumata KEITA
Le 25/5/2020