Coup de griffe : Tabaski ou Tabascrise ?

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Le jour de l’Aïd el-Kebir constitue un jour de célébration dans la tradition prophétique musulmane. En effet, dès l’annonce de la vision de la nouvelle lune, les musulmans glorifient la grandeur de Dieu par le takbir. Il est également fortement recommandé de multiplier les aumônes et les cadeaux ce jour-là. Elle est appelé en arabe l’Aïd al-Adha, signifiant « fête du sacrifice ») ou l’Aïd el-Kebir (la grande fête) par opposition à l’Aïd el-Fitr ou Aïd as-Seghir (petite fête qui renvoie à celle célébrée pour fêter la fin du ramadan).

C’est la plus importante des fêtes musulmanes. Elle a lieu le 10 du mois de dhou al-hijja,  le dernier mois du calendrier musulman, après waqfat Arafa, ou station sur le mont Arafat et marque chaque année la fin du hajj.

En Afrique occidentale et dans quelques pays de l’Afrique centrale (Tchad, Cameroun) elle est appelée Tabaski ou Tobaski (mot Wolof dérivé du mot berbère Tifeski/Tafaska, une ancienne fête islamique).

En Afrique du Nord, on l’appelle Tafaska chez les berbérophones. En Turquie, il est appelé Kurban Bayram? et dans les Balkans, Kurban Bajram. En Éthiopie, il est appelé Arefa. En Indonésie, on l’appelle Lebaran. Cette fête universelle commémore la force de la foi d’Ibrahim (Abraham dans la tradition judéo-chrétienne) à Allah, symbolisée par l’épisode où il accepte de sacrifier, sur l’ordre de Dieu, son fils Ismaël.

Après son acceptation de l’ordre divin, Dieu envoie l’archange Gabriel (Jibr?l) qui, au dernier moment, substitue à l’enfant un mouton qui servira d’offrande sacrificielle. En souvenir de cette dévotion d’Ibrahim à son Dieu, les familles musulmanes sacrifient un animal (le mouton qui a six mois ou la chèvre qui a deux ans ou le bovin qui a deux ans et qui est entré dans la troisième année lunaire ou le chameau qui a complété cinq ans) selon les règles en vigueur.

L’on comprend alors pourquoi tout le monde se démène pour trouver la bête à immoler. Plus précisément le mouton qui semble nous narguer, en se déambulant tranquillement, escorté par le berger ou le revendeur, dans les rues de Bamako où il est intouchable parce que trop cher.

Exceptionnellement, cette année où le Malien Lambda est frappé de plein fouet par les conséquences de la crise multifacettes qui a secoué le Mali, avec notamment la Covid19, la crise sociopolitique à laquelle s’ajoute la crise sécuritaire, il faut absolument affronter les difficultés d’une tabaski de crise.

Une tabascrise doit-on d’ailleurs dire ! Tout en se demandant, à la fin, avec ces agneaux vendus à 100 000 Fcfa dans le plus grand pays d’élevage de l’espace Uemoa et le deuxième dans la Cédéao : qui va tabasser qui finalement ?A seulement quelques jours de cette grande fête, les acheteurs se contentent beaucoup plus de discuter, marchander, sans pour autant délier le cordon de la bourse, espérant une baisse des prix aux derniers moments. Une baisse hypothétique si l’on sait que, comme on le dit en milieu berger, nous sommes en plein hivernage pluvieux. Par conséquent, les éleveurs pouvant trouver facilement de vastes prairies bien vertes pour faire paitre les troupeaux, ne sont donc pas sous la hantise de la mévente. Pas question donc de bazarder leurs troupeaux.

Il ne faut donc pas trop espérer prendre les bergers à l’usure, eux qui trouvent en la Tabaski le moment privilégié de récompenser le fruit de leur dur labeur et clament, tout haut, qu’ils sont victimes de la crise autant que tout le monde, pour avoir le droit de répercuter les coûts de production sur les prix de vente. Loisible alors de se demander, à ce jeu de tabascrise, qui tabasse qui finalement ?

Amadou Bamba NIANG

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