« Maïs-gate », le nouveau scandale qui éclabousse le secteur agricole : Bakary Doumbia, le président de l’Interprofession de la filière maïs dans le collimateur

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Le « maïs-gate », qui impliquerait jusqu’au cou Bakary Doumbia, le président de l’Interprofession de la filière maïs de Mali, est un scandale de plus qui risque de saper tous les efforts consentis ces dernières années par les plus hautes autorités pour le développement de cette filière très porteuse pour notre pays.

La chronique des scandales du secteur agricole de notre pays n’est sans doute pas près de s’estomper de sitôt. En effet, après le scandale des engrais frelatés, celui des équipements agricoles inadaptés en train de rouiller dans la cour de la Direction du matériel et des finances du matériel de la Direction nationale de l’Agriculture, celui de l’Union des cotonculteurs ou Affaire Bakary Togola, un nouveau scandale risque d’éclabousser le secteur. Il s’agit du contentieux entre l’Interprofession de la filière maïs et certains opérateurs céréaliers. Un feuilleton dont le prochain épisode se déroulera inéluctablement devant les tribunaux.

Tout serait parti d’un marché de fourniture de maïs au Stock national de sécurité alimentaire. En effet, la campagne agricole de 2019 dédiée à la promotion de la culture du maïs aura permis la production record de plus 3 millions de tonnes. Si ce record a été assez réconfortant pour les statistiques du pays, force est de reconnaitre que pour les producteurs de maïs, cette situation a engendré une dévalorisation du prix du maïs sur les marchés ruraux et un endettement des producteurs à la base. Ainsi, pour relever cette filière et permettre aux producteurs de mieux profiter du fruit de leur labeur, le Commissariat à la Sécurité alimentaire, à travers l’Opam, a engagé un vaste programme d’achat institutionnel de 5 000 tonnes de maïs sur toute l’étendue du territoire national, à travers l’Interprofession de la filière maïs du Mali. Il s’agissait, pour l’Interprofession, de mobiliser les producteurs de maïs pour fournir cette quantité à l’Opam, décidé à acheter les dits stocks à un prix rémunérateur.

Si cette initiative semblait innovante et surtout très réconfortante pour les producteurs de maïs, force est de reconnaitre que la gestion de l’opération a été catastrophique. Ainsi, au lieu de démarcher les producteurs, c’est-à-dire les détenteurs de petits stocks de maïs, l’Interprofession a jeté son dévolu sur les grands céréaliers du pays pour réaliser cette opération, moyennant un pourboire pour l’Interprofession ou pour son président.

Entre 20.000 à 40.000 FCFA de prime sur chaque tonne fournie

En effet, dans un accord tacite non écrit, le président de l’Interprofession de la filière maïs aurait fixé certaines conditions aux opérateurs économiques désireuses de participer à l’opération. Ainsi, si certains fournisseurs doivent accepter de payer 20.000 Fcfa sur chaque tonne de maïs livrée, d’autres par contre doivent aller à 40.000 Fcfa par tonne. Il suffit de faire un petit calcul pour se rendre compte que c’est un pactole de plus de 200 millions de Fcfa que l’organisation est sensée engranger pour cette opération.

Malheureusement, ce petit arrangement ne semblait pas emballer certains opérateurs qui avaient tenu à s’y soustraire. Ce fut le cas d’un certain Sidiki Badian Doumbia, céréalier confirmé installé à Koutiala. Il s’est formellement braqué contre cette pratique de décrépitude. Cependant, après avoir fourni sa quantité de maïs comme convenue dans le contrat qui le lie à l’Interprofession maïs, l’opérateur économique découvre au moment du payement qu’un montant de plus de 100 millions de Fcfa manquait à son compte.

Etonné, il interpelle le patron de l’Interprofession, Bakary Doumbia, qui n’hésite pas à lui dire que cet argent a servi à arranger ledit marché à l’Opam. L’opérateur économique qui n’en démord pas aurait trainé le patron de l’Iprofim (l’Interprofession) devant le Pdg de l’Opam. Ce dernier aurait fait écrouler toutes ces allégations. Selon nos sources à l’Opam, Bakary Doumbia aurait plutôt demandé au Pdg de cette structure de mentir aux opérateurs concernés par le dossier pour justifier l’extorsion de leurs fonds.

Mais le Pdg de l’Opam, conscient de la tournure que prenait l’affaire, aurait décliné l’offre de Bakary Doumbia. Pris de panique, Bakary aurait cherché à se défaire de l’étau qui se resserrait sur lui en donnant audit fournisseur des « chèques sans provision » à l’opération de Koutiala. « Où est parti l’argent, notre argent, c’est la question que se posent les opérateurs économiques concernés ».

Certains membres de l’Interprofession n’hésitent pas à répondre que c’est dans la politique que l’argent aurait été injecté parce que Bakary Doumbia s’était fortement engagé, pendant les élections législatives passées, en faveur d’un candidat repêché par la Cour Constitutionnelle de Manassa dans sa zone. Pour d’autres, il aurait investi tout cet argent dans une histoire de fourniture d’engrais qui a mal tourné. En tout cas, il se dit qu’il aurait fait disparaître tout seul cet argent des fournisseurs puisque les comptes de l’Interprofession seraient au rouge depuis des mois. Et les frais de location du siège de l’organisation restent impayés depuis plusieurs mois.

Où est Salif Bagayoko ? 

Il faut dire que le pire, dans ce dossier, reste la disparition mystérieuse d’un négociant céréalier du nom de Salif Bakayoko. Egalement protagoniste de cette affaire pour avoir fourni une quantité importante de maïs à l’Iprofim, le nommé Salif Bagayoko aurait disparu dans la nature depuis des mois, sans laisser de trace. Ce négociant aurait collecté les stocks des producteurs de maïs à travers le pays et auprès d’autres négociants pour un coût de plus de 100 millions de nos francs, avant de disparaitre dans la nature. Cependant, des sources proches de Salif Bagayoko affirment que l’argent issu de son contrat avec l’Iprofim aurait également été extorqué par Bakary Doumbia. Ce qui est sure, Salif Bagayoko reste introuvable par ses créanciers.

Bref, il arrive que la détresse vienne paradoxalement de ce qui était considéré comme une providence. Dans le domaine du négoce, un scandale peut facilement ravaler la providence. Les Partenaires et les membres de l’Iprofim ne nous démentiront point. Ils étaient censés développer un partenariat de confiance et promouvoir leurs business respectifs, mais par la force de la malice et de la mauvaise gestion du Patron de l’Iprofim, certains négociants céréaliers tels que Sidiki Badian Doumbia et les fournisseurs de Salif Bagayoko se trouvent totalement désorientés aujourd’hui.

Il faut dire que ce nouveau scandale dans le monde de l’Agriculture risque, sans nul doute, d’enrailler les efforts engagés ces dernières années par l’Etat et ses partenaires pour développer la filière maïs qui constituait le dernier espoir du monde rural depuis la crise qui secoue déjà le secteur coton.                                               

El Hadj A.B. HAIDARA

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